Éditorial de Juillet 2019

Notre dernier débat sociétal

la surconsommation *

 

Ou encore 

 

La croissance éternelle et infinie*

 

ou encore

Le rêve qui tourne au cauchemar...*

 

J'y tenais, à mon histoire de paramécies, dans le bocal. Mes élèves de 5è, à l'époque, adoraient observer ces petites bestioles nageant, frénétiques, dans la goutte d'eau croupissante déposée sur la   lame, sous l'objectif du microscope. Pas besoin de longues explications pour leur faire comprendre que cette bestiole, très prolifique dans les eaux stagnantes, croîssait d'une façon exponentielle, pour, ensuite, se raréfier dans son bocal devenu trop étroit, s'empoisonnant dans ses propres déchets. Puis remplacée par une autre faune microscopique, colonisant l'espace disponible à son tour, la paramécie, définitivement morte dans son bocal inextensible, renaissait, ça et là, à la faveur d'un bol de tisane oubliée sur le coin de l'évier, ou d'une modeste flaque d'eau verdâtre dans l'ornière d'un chemin champêtre.

 

Les endroits de renaissance possible de cette paramécie étaient, en fait, innombrables. Pourrait-on dire, de même, que les endroits où l'homme pourrait renaître, sur d'autres planètes, d'autres systèmes solaires, étaient innombrables, eux aussi ? Lorsque notre bocal, la planète terre, elle aussi inextensible, serait polluée par nos déchets, irréversiblement ? Existeraient-il des endroits privilégiés où nous réfugier lorsque terres, mers, ruisseaux, rivières, fleuves,  et air de la campagne seraient bourrés jusqu'au ciel de matériel électronique et d'un feutrage dense de particules de plastique ?

 

Tout cela pour vous dire que notre débat à propos de la surconsommation alla bon train. Tous les présents, à l'unanimité, étaient bien d'accord : on allait tout droit dans le mur, avec ça ! Il n'avait pas été nécessaire que j'aligne des articles de journalistes d'hebdomadaires français ou internationaux, récents ou beaucoup plus anciens. Tous les présents étaient, d'avance, persuadés que cela ne pouvait pas continuer ainsi !

 

Et pourtant cela continuait ainsi. Tous les jours « un peu plus pire » !! La surenchère, pour inciter à consommer, et accroître l'appétit de l'humain, dans tous les domaines, était devenue hallucinante : toutes les 5 minutes, le téléphone sonnait, vous incitant à ne pas rater la bonne affaire... Dans les déchetteries, on voyait s'accumuler objets et mobiliers hétéroclites, qui n'avaient parfois pour seul défaut que d'être fabriqués  en vraies planches, par un artisan, plutôt que par une firme spécialisée dans les matières pressées agglomérées au formol. Les vêtements, débordant des armoires, souvent en synthétique, n'y restaient plus très longtemps, devenus obsolètes, car, soit mal cousus, soit décrétés « plus dans le vent».

 

Pendant que les coutures se défaisaient suite à une comptabilité trop rigoureuse du temps de travail, les pantalons se blanchissaient aux fesses et se trouaient aux genoux,  à l'aide de machines spécialement conçues pour ce faire, vu la fantaisie des faiseurs de mode, déterminants en la matière.

 

 

Que faire des vêtements vraiment « vieux » ? Vieux en âge, c'est à dire ayant passé l'année pleine ? Souvent encore impeccables, car peu portés, ils donnaient l'occasion d'en faire de gros paquets, que l'on plaçait pudiquement au dernier étage des cases prévues pour, à différents endroits accessibles à tous. Le mieux étant encore de les apporter à la Croix Rouge, lorsque cet organisme d'intérêt publique n'était point trop encombré lui-même par le  poids de cette charité  forcée. L'idéal eut consisté à les revendre sur Internet.. C'était toute une industrie . Mais seul le dernier look intéressait véritablement.

Les enfants imposaient leur loi, formatés en ceci par la pub environnante. Qui eut osé commettre un crime de lèse-enfant ?!: Refuser l'ènième smartphone que possédaient déjà les copains, lesquels, eux, n'avaient pas eu à supplier pour obtenir cet ABC du confort moderne ! ? Les dernières espadrilles à la mode, au nom imprononçable en français ? La même tablette (très utile pour présenter ses cadeaux d'anniversaire) qu'avait reçue Liam dernièrement (Liam étant un prénom très moderne venu d'Asie – peut-être le même jour que la dernière cargaison qui livra dans un grand magasin spécialisé en tissu synthétique des épingles qui se cassent tout le temps). Où placer à la déchetterie, des épingles cassées, tête arrachée ? En attendant de le savoir, je piquais régulièrement mes épingles inutilisables dans une épaisse couche de papier torchon, avec l'espoir que les gants épais des employés communaux résisteraient à  ce piège involontaire lors du ramassage.

 

La durabilité était devenue le défaut premier ! Celui qui s'oppose au renouvellement ! D'un complet mauvais goût, pour ne pas dire pire !

 

Avait-on pensé, ce faisant, à tous les chômeurs dont le sort était induit par cette trop grande prévoyance !? Ne valait-il pas mieux beaucoup de travailleurs en train de fabriquer quelque camelote en plastique supplémentaire, plutôt qu'un petit peu de travailleurs en train de fabriquer un bon acier à partir de la récup ?

 

Quel citoyen était-on pour payer ses achats au comptant alors qu'à présent le crédit faisait travailler un tas de gens !?

Prévoir vos obsèques, c'est bien. Mais les prévoir à crédit, c'est mieux ! Vous préférez, au comptant, 5000, plutôt que 6000, sur quatre ans !? Et si vous mourrez avant, ben c'est tout bénéfice pour vos gosses ! (J'avais renoncé d'expliquer au type que je n'étais pas Maman Pelican désireuse de m'éventrer pour favoriser le goinfrage des bébés.) Je n'avais finalement pas fait de contrat obsèques.

 

« Mon dernier vendeur de voitures accepta gentiment que je paye comptant. Un moment, j'avais eu très peur, car l'avant dernier contacté,  au vu de ma résistance à accepter un crédit, m'avait carrément claqué la porte au nez...la portière, je veux dire ! »

 

Oui, tous les présents à notre débat avaient été bien d'accord. Une telle unanimité...rare pour un débat se voulant, par essence, engendrer un certain désaccord de principe.

 

Et les médic, vous y pensiez ? Il est marqué dans le journal qu'on commence à en manquer, en France, à présent. Paraîtrait-il que d'autres pays acceptent mieux de payer le bon prix pour ce qui n'a pas de prix, à savoir : notre santé !

 

En manquer !? Ciel ! Privés, déjà, de médecins, suite à la migration de ceux-ci dans les villes « de riches » -  nous commencions, de plus, à être privés de la matière première censée nous maintenir au top ! A quoi bon des ordonnances si les pharmacies se vidaient de leur substance !?

 

Dramatique pour un grand nombre – insulinodépendants – malades du cœur – des reins – de la thyroïde – et j'en passe - ne pouvait-on considérer qu'il s'agissait-là d'un bienfait pour les autres !? Un certain livre, qui fit couler beaucoup d'encre, de salive, de fiel, ainsi que des flots d'indignation, paru il y a quelques années, s'intitule :Guide des 4000 médicaments utiles, inutiles ou dangereux »(*)Sa lecture en avait impressionné plus d'un. 

Mais pour faire plus simple : dans une certaine maison de retraite (une EHPAD, parmi de nombreuses autres), une dame avait confié à quelqu'un de l'extérieur : « je suis soignée pour Parkinson. Je viens de rentrer de l'hôpital. Avant je prenais 32 cachets par jour. Ils me les ont diminué à 12 par jours. Depuis, je vais mieux. »

 

Nous étions loin d'avoir épuisé le sujet. Loin d'avoir aligné les chiffres consternant témoignant du gâchis apocalyptique environnemental. D'en avoir touché du doigt tous les domaines intermédiaires, depuis les denrées de première nécessité, jusqu'aux épingles dont les têtes s'envolaient au moindre souffle. Le tout emballé dans des barquettes ou boîtes plastiques. Loin seulement d'avoir tenté » d'en établir un inventaire cohérent !

 

Que pouvait-on faire, à part ressasser l'idée qu'il n'y avait pas grand chose à y faire...A moins que d'un coup de baguette magique, nous puissions y sensibiliser nos dirigeants respectifs !? Lesquels, à coup sûr, à partir d'un aussi brutal coup de frein, se trouveraient le nez dans le pare-brise, dans tous les sens du terme !

 

Il est permis de rêver, non !??? C'est gratuit, et ça ne pollue pas. Les rêves, c'est bon pour la santé, et l'effet placébo, souvent, c'est encore plus utile qu'un vrai médicament ! Et puis, vous savez, le nez dans le pare-brise, on en réchappe ! (Parfois...)

 

Allez, on allait faire une pétition sur internet ! C'était décidé ! Envoyé à Mr Emmanuel Macron ! Il avait l'air plutôt énergique. Avec un petit éclair dans l'oeil permettant d'en augurer un sens de l'humour aiguisé, et une détermination exemplaire. Dommage, il était pour l'accroissement de la  croissance, comme tous les autres chefs d'état. Et pour la Mondialisation. Et celle-ci est contraire aux lois naturelles de l'écologie, tout le monde sait...

 

Alors, que faire !? Allez, une pétition, en vitesse ! 

 

 

*) Voyez la pétition, page d'accueil, en-haut à gauche, et contribuez, par votre signature, à la préservation de notre planète !

*) Le texte ci-dessus est intégralement repris dans notre Edito de Juillet 2019

*) Auteurs du livre : Pr Philippe EVEN et Pr Bernard DEBRE

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