La réalité, depuis la production des déchets dits inertes, jusqu'à leur lieu de stockage." Interview d'un chef de chantier

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Depuis la production de déchets dits inertes, jusqu'au site de l'installation de stockage de déchets inertes, cela se passe comment !?

(dans la P R A T I Q U E)

 

Discussion avec un chef de chantier

 

Nous venons d'avoir l'occasion de nous entretenir avec l'un des amis de l'un des membres de notre comité. Sous réserve d'anonymat, il s'est prêté à nos questions concernant les pratiques dans le BTP, depuis la production des déchets concernés, jusqu'à leur destination dans une ISDI. Nous avons l'intention de filmer en vidéo un second entretien avec cet homme, mais lui-même restant invisible, et sa voix déformée... (Pas question qu'il perde son emploi pour avoir « trop parlé » !!)

 

Ceci est donc un 1er jet qui sera affiné par la suite...sous forme, pour l'instant, d'un texte écrit... :

 

QUESTION : Est-ce que les camions peuvent transporter « de la terre » ?

REPONSE : Oui, ils peuvent...mais le plus souvent c'est du mélange...

 

QU :du mélange de quoi ?

R : tout ce qui concerne la démolition, cela dépend de ce qu'on démolit...

 

QU : mais aussi ce  qu'on appelle « de la terre arable » ? 

 

R : cela se peut, mais cela n'est alors pas mis dans ces installations, la terre arable se paye, alors que là le déposeur paye, lui, pour déposer.

 

QU : alors, ce peut être quoi, la « terre » qu'on peut être amené à déposer dans ces ISDI?

 

R :On peut dire ça pour des terrassements, oui, alors là, on peut dire « terre », mais c'est de la terre glaise, du sable, calcaire, marne, etc.

 

QU : est-ce que cela est plutôt bon ou plutôt mauvais pour le sol ?

 

R : ça, c'est plutôt bon.

 

QU : donc c'est possible que dans ces ISDI, il n'y ait que des bons matériaux pour améliorer le sol !? Pour améliorer « le biotope » disent les scientifiques ?

 

R : Ce n'est pas du tout possible dans la pratique. Car l'exploitant fait un contrat avec les loueurs de bennes. Pas avec l'entreprise de maçonnerie. 

 

QU : et en quoi cela rend la chose impossible ?

 

R : Car les loueurs de benne prennent, selon l'opportunité des travaux des entreprises de maçonnerie, tout ce qui se présentent, ils ne peuvent pas s'amuser à ne choisir « que des entreprises qui font du terrassement ». Et d'ailleurs aucune entreprise ne fera « que du terrassement », elle va s'adapter aux marchés : fera 15 jours p.ex.du terrassement, et quand c'est fini, autre chose. Une autre entreprise, pendant ce temps, aura appelé le loueur de benne pour la démolition d'un bâtiment et mettra dans les bennes ce qui se présente : des cailloux, des briques mélangées au plâtre, de la caillasse, etc. Sauf pour ce qui est strictement interdit pas la loi : l'amiante, et les déchets toxiques...vous avez par exemple du bois plombé...

QU : c'est quoi au juste ?

 

R : des cloisons en bois enduites d'une peinture à base de plomb (toxique), on faisait beaucoup ça dans le temps...

 

QU : alors, c'est évacué « à part » ? 

 

R : En principe oui. Mais si on a rempli une benne, ou 2 bennes, et qu'il reste une demi-benne, on va bien sûr la répartir, un petit peu par-ci, une petit peu par là, dans d'autres bennes, ça dépend du patron, en fait. On ne va pas louer une 3è benne juste pour ça si on ne la remplit qu'à moitié. Car cela coûte entre 6 et 8000 € la benne avec du bois plombé, donc les frais sont trop grands pour payer la benne entière, si on ne la remplit qu'à moitié, donc on va répartir le bois plombé un petit peu partout et « ça passera avec le reste. sinon on ne s'en sort pas !

QU : et cela alors ira dans la ISDI   avec  les matières non dangereuses, et les « bons remblais?

R : oui, forcément. 

QU :Mais si c'est découvert, l'entreprise de maçonnerie est alors responsable ?

 

R : oui, elle est responsable...à vie

 

QU : mais si elle n'existe plus ?

R : Ah, alors là...

 

QU : et avec l'amiante, ça se passe comment ?

R : on avertit le loueur à l'avance et il enveloppe les déchets amiantés dans des plastiques spéciaux. Si p.ex.on a à évacuer des carrelages posés avec de la colle amiantée (cela se faisait beaucoup pour les constructions à partir de 1960), cela nous coûte, par mètre carré, sur 1 mm d'épaisseur environ 20 000 €. Donc on regarde d'abord le chantier avant d'accepter l'offre...

 

QU : alors l'amiante est strictement surveillée, et il ne peut y avoir de l'amiante dans une benne contenant des déchets inoffensifs ?

R : si, il peut forcément y en avoir : si nous enlevons une cheminée tapissée à l'amiante, on ne va pas louer une benne pour ça, donc on évacue avec le reste...

 

QU : mais QUE des bennes avec de la bonne terre de terrassement, on peut faire ça !?

 

R : non, car dans une entreprise, vous avez différentes équipes : les unes s'occupent du terrassement, pendant que les autres s'occupent de la démolition, et toutes apportent cela sans qu'on regarde quelle benne prend ceci ou prend cela– à moins qu'il s'agissent d'amiante, ou de déchets spécialement étiquetés comme dangereux...

 

QU :  par exemple ? 

R : Par exemple la destruction du sol d'une station service, imprégnée de gaz oil...

 

QU : Revenons à nos bennes pas entièrement remplies de terre de terrassement : on ne peut donc certifier qu'il y aura dans ces ISDI  QUE de la terre de terrassement ?

 

R : c'est matériellement impossible qu'il n'y ait que cela. Les matériaux de démolition de toute nature en feront partie.

 

QU : mais des contrats avec des entreprises qui ne font QUE du terrassement, ce n'est pas possible !? 

 

R : une entreprise de maçonnerie fait tout, pas que du terrassement. Et de plus les loueurs de bennes qui font les contrats avec les ISDI prennent toutes entreprises de BTP qui font appel à elles. Elles ne vont pas les trier pour faire plaisir à une ISDI qui ne voudrait prendre que du terrassement. Et aucune ISDI ne pourra se permettre de n'accepter que les bennes faisant du terrassement. Donc il y aura forcément un mélange...

 

QU : dans quelles proportions ce mélange pourra-t-il contenir des matières nocives ?

R : pas possible de le dire...

 

QU : elles en contiendront ?

R : forcément...

QU : Vous triez le plâtre ?

R : non, il va avec le reste...

 

QU :Vous triez les laines de roche, de verre !?

R : pas du tout, nous n'y sommes pas tenus...

 

QU : elles sont nocives 

R : oui

 

QU : cancérigènes, à votre avis ?

R : très probablement

 

QU ; dans tous les cas, si elles ne le sont pas, elles peuvent provoquer de l'asthme, fibroses, etc...

R : tout à fait !

 

QU : alors, pourquoi aucune précaution n'est-elle prise ?

R : parce qu'actuellement il existe un fort marché, techniquement bien structuré, pour travailler sur l'amiante. Rien n'est organisé pour travailler sur l'évacuation de ces laines. Donc on ne peut pas les déclarer dangereuses. Comment on ferait pour les évacuer !? Mais lorsqu'il n'y aura plus d'amiante à évacuer, forcément, on va les déclarer dangereuses, et alors, on se  développera techniquement pour les évacuer avec la sécurité requise.

 

QU : donc, actuellement, ces matières dangereuses partent, avec le tout venant, et aussi avec

les « bons » déchets du terrassement,  appelés  « terre »?

R : oui, forcément, elles partent « avec »

 

QU ; et le propriétaire du site, dans tout ça !?

R : il n'a ni droits ni devoirs, aux yeux de la loi. Ce sont les entreprises de BTP qui sont les responsables, pas lui. Lui-même ne paye que ses frais de montage de l'entreprise (clôtures, etc.) et du personnel de réception et de contrôle, et il encaisse les bénéfices (paiements des loueurs de bennes – et c'est tout – aucun risque pour lui.